Le 10 mai 2015
Repéré à distance ! Ce conducteur « négligent » a garé sa BMW sur un angle de l’avenue Jaurès (XIXe), à cheval sur deux passages piétons. Il va être verbalisé par un policier situé… à 5 km de là, dans les sous-sols de la Préfecture de Police, sur l’île de la Cité (IVe).
En trois clics, le fonctionnaire installé derrière son ordinateur oriente une caméra de vidéosurveillance sur le véhicule en infraction, zoome sur la plaque d’immatriculation et prend une photo. Des éléments transmis quelques secondes plus tard au centre national de traitement des amendes deRennes. Le propriétaire de la BMW, qui ne s’est évidemment aperçu de rien, recevra le « vidéo PV »
Nous sommes dans l’Unité de vidéoverbalisation (UVV) de la préfecture de police, un service créé en avril 2013 pour « tester » la surveillance des automobilistes à distance sur 14 grands axes de la capitale. Les six policiers qui le composent vont devoir mettre les bouchés doubles à partir d’aujourd’hui.
Conçu pour sanctionner les infractions les plus gênantes pour la fluidité du trafic (arrêt en double file, circulation dans les couloirs du bus…), le système a fait la preuve de son efficacité dans les rues où il est expérimenté depuis deux ans. Il va donc être étendu, dès ce matin, à 34 nouveaux grands axes couvrant la quasi-totalité de la capitale.
Les axes concernés
Les « vidéo policiers » n’y traqueront que les infractions routières ne nécessitant pas l’interception du conducteur. « Les stationnements dangereux, les arrêts en pleine voie, la circulation dans les voies réservées ou encore les franchissements de feux rouges sur des carrefours identifiés comme accidentogènes » énumère le lieutenant Rocca, responsable de l’UVV. « D’autres infractions comme les changements de file non signalés ou une vitesse visiblement excessive ne sont pas vidéo-verbalisables » précise-t-il.
« Ce système, c’est avant tout un outil de régulation du trafic » souligne le commissaire Rault, responsable de la direction de l’ordre public et de la circulation (DOPC) à la préfecture de police. Derrière lui, les policiers continuent à scruter leurs écrans où s’affichent des mosaïques d’images renvoyées par quelques-unes des 1 200 caméras de voie publique de la capitale.
Leur surveillance, évidemment renforcée aux heures de pointe du matin et du soir, n’est pas liée qu’au hasard. « L’UVV est en contact avec la salle de commandement de la préfecture de police, avec le PC circulation de la ville de Paris ou encore avec la RATP. On adapte notre surveillance en fonction des informations sur les conditions de circulation qu’ils nous transmettent ces services » détaille le commissaire Rault.
Le dispositif qui repose sur un contrôle humain et non sur un système automatisé ne prétend pas à l’exhaustivité. Mais les automobilistes auraient tort de miser sur cette donnée pour espérer échapper aux PV-vidéo. « Le nombre de voies sous surveillance a doublé. Les effectifs du service de vidéoverbalisation vont être renforcés en conséquence », avertit la préfecture de police.
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100 km de rues sous l’œil des caméras
Le boulevard de Magenta, l’avenue d’Italie, la place Denfert-Rochereau, l’avenue de Versailles, la porte Maillot, l’intégralité des grands boulevards… A partir d’aujourd’hui, la vidéoverbalisation est applicable sur la quasi-totalité des grands axes routiers de la capitale et sur huit carrefours dangereux qui ont été intégrés au dispositif. Le système est par ailleurs étendu à tous les couloirs de bus. Au total, les « vidéo policiers » vont désormais pouvoir verbaliser à distance sur plus de 100 km de voirie parisienne.
Sur les 14 grands axes où le dispositif est opérationnel depuis 2 ans (en bleu sur notre infographie), plus de 65 000 PV ont déjà été dressés par vidéo. Près des deux-tiers (60 %) concernaient des infractions à l’utilisation des couloirs de bus. Ces vidéo-PV (authentifiés par une photo avec signature numérique conservée pendant 5 ans dans les locaux de la préfecture de police) n’ont pas donné lieu à beaucoup de contestations. « Seulement 5 dont une seule recevable » précise-t-on à l’Unité de vidéoverbalisation.
Même si les policiers du service n’ont matériellement pas les moyens de repérer toutes les infractions commises sur les voies « vidéo-verbalisables », leur action aurait cependant déjà eu un impact bénéfique sur la fluidité de la circulation dans les rues concernées. Sur le boulevard Sébastopol par exemple, les PV dissuasifs (90 € pour un passage dans un couloir de bus, 135 € pour un stationnement en pleine voie) ont entraîné une nette diminution des arrêts en double file qui génèrent des bouchons. Selon la préfecture de Police, la vitesse moyenne sur cet axe très fréquenté a augmenté de 3 à 4 km/h depuis la mise en place de la vidéoverbalisation.