Le 12 décembre 2016
Pour le philosophe Michaël Fœssel, l’état d’urgence, passé d’un dispositif temporaire à un état permanent, s’inscrit dans le quotidien et plonge les citoyens dans une atmosphère de défiance constante.
Michaël Fœssel est professeur de philosophie à Polytechnique et chroniqueur à Libé. Il a mis à jour à l’automne son livre Etat de vigilance (Points), paru en 2010. La prolongation de l’état d’urgence est pour lui une nouvelle preuve de la «banalité sécuritaire». (Photo DR)
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Sauf surprise, l’état d’urgence sera une nouvelle fois reconduit cette semaine. Est-il à jamais notre nouveau quotidien ?
Ce gouvernement et ceux qui suivront se sont condamnés à reconduire une mesure en partie symbolique : ses effets réels contre le terrorisme sont limités. On fait rarement le bilan des lois sécuritaires.
A-t-on publiquement débattu des résultats des cinq lois relatives à la sécurité publique et au renseignement votées depuis 2012 ?
L’état d’urgence ressemble à Vigipirate. Un dispositif exceptionnel et temporaire… avec lequel nous vivons depuis vingt ans.
C’est le propre de la banalité sécuritaire : les débats contradictoires ont lieu au moment de la mise en place des nouveaux dispositifs.
Puis ceux-ci deviennent évidents, ils s’installent dans le monde commun au point de ne plus êtres interrogés.
La notion de sécurité est devenue si large et si imprécise qu’il est presque impossible de lui opposer la question des droits.
Qui pourrait être contre la sécurité ? Nous finirons bien par sortir un jour ou l’autre de l’état d’urgence mais la promesse de sécurité, elle, est devenue la fin en soi de l’action politique.
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