Alors que l’ère de l’industrialisation du drone civil s’ouvre, l’acceptabilité sociale (1) de cet envol repose essentiellement sur les bénéfices qu’ont martelés la filière économique, le discours politique et la présentation ludico-médiatique, bref toutes les parties prenantes qui se partageront les bénéfices sans s’étouffer avec les inconvénients qui nous incomberont.
Le cheval de Troie de ce processus bien rodé d’acceptation sociale repose sur les applications sociales dites utiles des drones civils.
Allons citoyens, n’appréciez que les usages et avantages incontestables de ces innovations et cessez d’interroger les hypothétiques dérives. Seriez-vous contre le progrès ? contre la croissance ? et si vous êtes bien sage, vous pourrez même jouer avec !
Dans le sillon du drone militaire, le drone civil fait le sale boulot en rapportant gros. Comme l’expose sa fédération professionnelle (2) « les drones ont trouvé leurs premières applications militaires dans les tâches dites « 3D » : dirty, dull, dangerous (Sales / Monotones / Dangereuses). Leur transfert vers le secteur civil a permis d’imaginer plusieurs centaines d’applications civiles, ce qui ouvre une croissance potentielle considérable dans des secteurs très variés et nouveaux. »
Les impacts recensés sont souvent positifs car les drones civils sont uniquement référencés comme apporteurs de solutions ou d’affaires.
(3) Du drone chasseur de frelons asiatiques au drone chasseur de taggueurs jusqu’au drone livreur de pizza ou au service des archéologues, les drones civils cartographient, inspectent, filment, surveillent, recherchent, analysent, modélisent, observent, sauvent, et s’invitent même dans les festivals et carnavals.
4 projets drones étaient présentés sur le parcours de l'innovation de NOVAQT organisé par le conseil régional d'Aquitaine, Aquitaine Développement Innovation et Aerocampus Aquitaine en décembre 2013 :
Le drone aquatique Droneo de R&Drone pour surveiller la profondeur et la qualité des eaux ; le robot VITIROVER pour entretenir de grandes surfaces enherbées, permettant d’éviter les désherbants chimiques ; le drone Vitidrone de Fly-n-Sense et Vitivista pour apporter un service de télédétection réactif, précis et peu coûteux, à partir de drones autonomes sur l’échelle d’une exploitation viticole ; l’innovant contrôle gestuel d’un essaim de drones du Labri et de l'Université de Bordeaux : Développement d’un démonstrateur pour piloter plusieurs drones simultanément à l’aide d’un capteur de mouvements de type Kinect. Le contrôle est réalisé par des gestes de l’opérateur, après un apprentissage de 2 à 3 minutes.
L’opération séduction est gonflée par les premiers pas des acteurs industriels au label grand public « ils leur ont fait confiance donc ayez confiance » (4)
RESEAUX : EDF, GRTgaz, ERDF, RTE, SNCF, RFF (observation des voies ferrées, des réseaux de lignes électriques à haute tension, des pipelines et des gazoducs ; reconnaissance d’incidents et d’actes de malveillance).
ENVIRONNEMENT, BTP : Veolia, Groupe Monnoyeur (dépollution sous-marine, mesure de la qualité de l’air… Inspection des ouvrages d’art, pathologies des bâtiments, gestion améliorée des grands chantiers).
AGRICULTURE, FORETS : Magrez, chambre d’agriculture de la Somme (analyse spectrale de la végétation, mesure du stress hydrique et de la présence de maladies dans les cultures, optimisation des intrants, calcul du volume de bois dans une forêt).
MINES ET CARRIERES : Lafarge (imagerie 3 D pour l’évaluation des stocks de minerais extraits, relevés des courbes de niveaux pour suivre l’avancée de l’exploitation).
INDUSTRIE LOURDE : ArcelorMittal (observation des sites Seveso, détection de fuites thermiques et chimiques, mesure des pollutions, surveillance des installations sensibles).
ENERGIE : Total, Areva, Cerap (Suez Environnement), GrDF (inspection technique en zones à risque : plates-formes offshore, méthaniers, centrales nucléaires).
ENERGIES RENOUVELABLES : EDF Énergies Nouvelles, Alstom (maintenance des éoliennes et intervention rapide en hauteur, inspection des barrages, détection des cellules photovoltaïques défectueuses).
Quand les drones civils surveillent et contrôlent, on se réfère plus volontiers aux feux de forêt, lignes électriques haute tension, aux régions éloignées et peu accessibles, aux zones de pêche, aux niveaux de pollution atmosphérique ou en mer, au trafic routier….qu’aux frontières, populations, migrants, manifestations…
Cette opération séduction amorce l’acceptabilité sociale de l’invasion des drones dans notre espace public aérien et passe sous silence son usage sécuritaire.
Ce qui préserve de projets industriels aujourd’hui c’est la non-acceptabilité sociale.
Ce n’est pas l’acceptabilité d’un projet par la majorité : l’opposition d’une minorité peut bel et bien suffire à bloquer un projet. (1)
Cet article est une contribution du Collectif Contre Les Abus Policiers de Bordeaux, C.L.A.P.33, à la campagne « Alerte Coopérative Anti-drone sécuritaire ».
Notre espace public aérien est aussi une Zone A Défendre et doit rester une Zone Anti-Drone.
(2) http://www.federation-drone.org/les-drones-dans-le-secteur-civil/les-applications-civiles/
(3) ex drones civils
http://www.smartplanet.fr/smart-technology/les-drones-futurs-livreurs-de-pizza-26418/
(4) http://www.usinenouvelle.com/article/les-drones-attaquent-l-industrie.N235484