Le 17 juin 2013.
Créé il y a quinze ans, le Fichier national automatisé des empreintes génétiques (Fnaeg) recense désormais plus de deux millions de profils et comporterait, selon certains généticiens, des données ultrasensibles.
Tout part de l’affaire Guy Georges. Face à l’émotion suscitée par l’arrestation tardive de ce violeur multirécidiviste, le gouvernement Jospin décide de créer le Fnaeg, le Fichier national automatisé des empreintes génétiques. C’était il y a quinze ans, jour pour jour : le 18 juin 1998. La vocation de ce fichier est simple : il s’agit de recueillir les empreintes génétiques associées aux infractions sexuelles (qu’il s’agisse des empreintes d’individus condamnés ou de traces retrouvées sur les scènes de crime).
Petit à petit, le périmètre du Fnaeg va s’accroître. Progressivement. Inexorablement. Entre 2003 et 2010, six lois successives vont étendre son champ d’application. Aux infractions sexuelles s’ajoutent les crimes les plus graves, puis tous les crimes et, enfin, la grande majorité des délits. Comptant 4 369 empreintes en 2002, il en recensait 2 188 971 dix ans plus tard.
Le « fichier des délinquants potentiels »
Autre spécificité du Fnaeg : les profils d’individus ayant simplement été inquiétés par la police (avant d’être mis hors de cause) sont eux aussi recensés. Ils représentent d’ailleurs le gros du fichier (75 %). À l’origine «fichier des violeurs», le Fnaeg est finalement devenu le «fichier des délinquants potentiels».
Plus grave, il contiendrait aux dires des scientifiques plus d’informations génétiques qu’annoncé au départ. C’est notamment la conviction de Catherine Bourgain, chercheuse en génétique à l’Inserm et auteur de ADN, superstar ou superflic (Seuil). «Officiellement, le Fnaeg ne comprend que des segments d’ADN non codants, ce qu’on appelle vulgairement l’“ADN poubelle”(1). Cette partie de l’ADN est censée ne contenir aucune information génétique et permettre simplement l’identification des individus.»
Seulement voilà, plusieurs recherches récentes viennent bousculer cet a priori. «De nombreux travaux mettent désormais en évidence des liens entre des segments localisés dans les zones d’“ADN poubelle”et certaines maladies génétiques rares», assure Catherine Bourgain. À l’entendre, le Fnaeg contiendrait donc des informations sensibles n’ayant rien à faire dans un fichier de police.
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